« Le Grand Bleu », des records à des profondeurs vertigineuses, des athlètes aux capacités surhumaines… L’imaginaire collectif autour de l’apnée est puissant, fascinant, mais il est souvent bien loin de la réalité que nous vivons chaque jour en mer. Cette aura de sport extrême, réservé à une élite, a la vie dure. Et pourtant, elle est fausse.
Aujourd’hui, on appuie sur pause, on rembobine et on démêle le vrai du faux. Voici 5 idées reçues qui effraient ou découragent inutilement, et pourquoi il est temps de les oublier pour découvrir le vrai visage de l’apnée : celui d’une pratique douce, accessible et profondément joyeuse.
Mythe n°1 : « Il faut avoir d’énormes poumons. »
C’est le cliché par excellence. La vérité, c’est que l’apnée est avant tout un sport d’efficacité et de relaxation, pas de capacité. Imaginez deux voitures : un gros 4×4 avec un réservoir de 100 litres qui consomme énormément, et une petite citadine hybride avec un réservoir de 40 litres très économe. Laquelle ira le plus loin ? C’est la même chose pour nous. Mieux vaut avoir des poumons de taille moyenne et un corps parfaitement détendu, qui consomme très peu d’oxygène, qu’une cage thoracique de géant avec un mental stressé et une technique énergivore. Le secret n’est pas d’avoir plus d’air, mais de mieux utiliser celui que l’on a.
Mythe n°2 : « L’apnée est un sport extrêmement dangereux. »
La vérité est plus nuancée : l’apnée comporte des risques objectifs, mais une pratique encadrée et respectueuse des règles la rend remarquablement sûre. Le danger en apnée ne vient presque jamais de l’activité elle-même, mais de l’ignorance ou de la négligence des règles de base. La règle d’or, notre mantra, est de ne jamais, jamais plonger seul. Un accident en apnée (comme une syncope) est grave uniquement parce qu’il se produit dans l’eau. Avec un binôme attentif et formé qui vous ramène à la surface, le risque est maîtrisé. C’est comme la randonnée en montagne : c’est une activité sûre si l’on respecte la météo, son itinéraire et son équipement.
Mythe n°3 : « C’est une pratique réservée aux jeunes athlètes. »
C’est tout le contraire ! L’apnée est l’une des rares disciplines où la force brute et l’explosivité sont des désavantages. Le calme, la patience, la conscience de son corps et la capacité à se détendre sont les qualités reines. Et ces qualités se développent souvent avec la maturité. J’ai vu des personnes de 50 ou 60 ans découvrir l’apnée et y trouver un bien-être et une aisance que des jeunes de 20 ans très sportifs peinent à atteindre. C’est une pratique douce qui s’adapte à chacun, où l’on progresse toute sa vie.
Mythe n°4 : « Le but est de tenir le plus longtemps possible sous l’eau. »
Cette confusion vient de la vision compétitive de l’apnée. Pour 99% des pratiquants, l’objectif n’est pas la performance, mais le plaisir. La vraie question n’est pas « combien de temps je tiens ? », mais « est-ce que je me sens bien ? ». Une apnée de 45 secondes vécue dans un confort et un émerveillement total vaut infiniment plus qu’une apnée de 2 minutes passée à lutter contre soi-même. Le but est d’allonger la durée de la zone de confort, pas de flirter avec la zone de souffrance.
Mythe n°5 : « On ne voit rien d’intéressant si l’on ne descend pas profond. »
C’est l’une des plus grandes erreurs de jugement. En réalité, 90% de la vie marine la plus riche et la plus colorée se trouve dans les 10 premiers mètres. Pourquoi ? Parce que la lumière du soleil, source de toute vie, y est la plus abondante. C’est là que les algues et les herbiers poussent, offrant nourriture et abri à une myriade de poissons et de crustacés. Les fonds de nos criques groisillonnes, entre 3 et 8 mètres, sont de véritables jardins grouillants de vie, bien plus que les déserts bleus des grandes profondeurs.
L’apnée n’est donc pas une pratique d’exception pour des gens exceptionnels. C’est une invitation à la simplicité, à l’écoute de soi et à l’émerveillement. Une porte ouverte sur un autre monde, accessible à tous ceux qui sont prêts à y entrer avec respect, humilité et curiosité.
À bientôt dans le bleu,
– Maël
